"GAW GAGAW GAGAW GAGAW" par DJ ROODOO

undefinedParfois je me dis que la techno c’est comme un truc de jedi. Avec un côté obscur et tout. Désolé pour les références hollywoodiennes fastoches, mais voilà le gars qui a vu «l’Empire contre attaque » 358 fois, et qui a joué très tard avec ses figurines de Luke et D2R2 (et encore je ne parle même pas du jeu de rôle) . Après comme tout le monde j’ai commencé à m’intéresser à d’autres jeux, mais bon j’ai toujours envie de pleurer quand je vois une belle maquette du Millenium Falcon ou un droïd astromec taille réelle. Allez, quoi, fais bip-bip, merde, juste une fois... Ces trucs là ça te façonne un imaginaire, c’est quelque chose qui te lâche plus même quand t’es censément trop vieux pour ces conneries. Nerd un jour, nerd toujours.
Alors déjà évidemment la techno c’est un truc de SF. C’est peut-être moins clair maintenant que tout le monde a l’adsl, un Ipod et Live 6.0 en version crackée chez soi, et que la musique électronique est aussi intégrée à nos habitudes que la première imprimante laser venue. Mais, quand la house est arrivée, fin 80’s début 90’s, putain mec, c’était BIZARRE ! Honk tsssii honk tsssii…blibliblibliblip…gaw gagaw gagaw gagaw…On ne savait pas du tout d’où sortaient ces sons. Enfin, on en avait une vague idée, mais franchement en 1990 à part ceux que ça concernait directement, qui savait réellement ce qu’étaient un sequencer, un sampler, une tb 303 ? Au mieux on en entendait parler dans les quelques fanzines qui témoignaient des premières raves, et ça résonnait à nos oreilles comme ces mots futuristes et tarabiscotés qu’utilise monsieur Spock lorsque l’Enterprise a une couille sous le capot. Bordel, ou est mon défibrillateur protonique à ondes alpha ? Kirk, passez moi la tb 303, que j’injecte un peu d’acide plasmatique dans la turbine rétro-séquentielle…Et puis l’esthétique ? Evidemment aujourd’hui les bandanas fluos, les smileys et autres lunettes de mouche ont pris un coup de vieux, mais ces groupes qui déboulaient avec des noms comme Phuture, LFO, Future Sound of London, Orbital, et ces flyers psychés qui arboraient fièrement des « Live the Dream », « Outer Space », « UFO » , « Invaders », « Cosmos Factory », pour annoncer des soirées clandestines qui duraient des week end entiers ?! Si c’est pas de la SF, ça…Pour qui trouvait le présent un peu grisâtre, ça vous avait une autre gueule que les redondances passéistes de la pop et les constats sinistres du rock pré-grunge…Le hip hop à la limite proposait une vision, mais tellement engluée dans le social-défaitisme que ça ne pouvait pas vraiment toucher les gosses blancs des classes moyennes et aisées d’Europe qui composaient le gros des troupes technoïdes. Tout roulait, ou presque, à un ou deux oursins sexuellement transmissibles près…Le mur était tombé. La guerre, oui, mais chirurgicale…Et tellement loin de nous surtout ! Et là, voilà une mouvance neuve, optimiste jusqu’à l’extase, résolument tournée vers le futur…C’est là qu’on a plongé, qu’on est devenu des ravers.

C’est aussi là que ça se corse. On est resté dans la science fiction, mais on est un peu passé de l’autre côté du miroir. C’est devenu nettement moins space-opera d’un coup, beaucoup plus cyberpunk. La house, attachée encore par endroits à certains schémas pop, était en partie assimilable, les majors companies l’ont prouvé en régurgitant l’eurodance, zis is ze rizeum of ze naïte, oh yé. Mais c’était trop tard. Detroit nous avait déjà livré la techno, l’Angleterre le drum’n’bass, l’Allemagne, la trance, la Hollande le hardcore. Et nous avons commencé à vivre des trucs vraiment CHELOUS avec ces musiques. Des transes collectives. Des drogues télépathiques. Des nomades motorisés qui posaient leur son n’importe où, quand ils le voulaient, et en trois jours convertissaient des milliers de perchés. Le tamtam urbain, la rumeur de l’underground. Ça a commencé à devenir mystique, cette affaire, un truc de croyants et d’initiés. De Georges Lucas on est passé à William Gibson, en quelque sorte, un mélange de Mad Max et du Neuromancien. Le son a suivi, tempo crescendo et de plus en plus abstrait, acide et industriel…Et on a commencé a prendre beaucoup d’ampleur. Et à faire peur. L’Angleterre la première a légiféré pour tenter d’endiguer le truc, et la France a emboîté le pas peu après. On a eu droit à tout. Musique de pédés. De drogués. De nazis…Pédés et drogués, bon…Y’avait de ça, entre autres. Mais nazis ! Fallait-il qu’ils aient besoin d’un argument massue pour nous dégommer ! C’est le moment où la maréchaussée entre dans la danse, multipliant les interdictions de soirées, et tout ça se met à prendre de faux airs de guérilla festive et sonore. Les mecs d’Underground Resistance et leurs attitudes de black panthers du futur. La Spiral Tribe, « you might stop the party but you can’t stop the future »…On se retrouvait tout à coup en lutte ouverte contre l’Empire. On concrétisait régulièrement le fumeux concept de Zone Autonome Temporaire. Et bien sûr, allumés jusqu’à la couenne. Des jedis, quoi…CQFD.
A Suivre… Petit lien à écouter en lisant cette chronique :  http://fr.youtube.com/watch?v=wKtLInYG_Hk
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